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CE SOIR ON VA AU CINOCHE !

PAR JEAN-CLAUDE ROCLE

IL N'Y A PAS SI LONGTEMPS, MOI, MES COPINES ET COPAINS, SORTIONS DU CINÉMA EMPLIS DE VIE.

Dissimulés entre les pare-chocs des "dauphines", ou devant le capot des "deux chevaux", cachés dans l'angle des hautes portes cochères, nous prolongions le merveilleux rêve que venaient de nous délivrer les images : duels au fleuret, poursuites à cheval, aventures trépidantes, inquiétantes, burlesques, et, suprême expérience, baiser à la princesse prisonnière en sa tour.

Mythe ou réalité ?

 

Il n'y a pas si longtemps les cinémas s'appelaient Clichy-Palace, Monte-Carlo, Gaité-Clichy, Gloria..

Le soir venu, tout doucement, dans l'air frisquet de l'automne roussissant, nous quittions nos rôles, déposions nos armes et nos masques et, mine de rien, redevenions nous-mêmes.

 

Seul restait, flottant autour de nous comme une aura de mystère, la frontière d'un pays de cocagne, le pointillé d'un rêve qui s'évanouissait dans un étrange sentiment de béatitude joyeuse et mélancolique à la fois : LE BONHEUR !

 

Bonheur d'avoir vécu des vies incroyables, d'avoir éprouvé des sentiments qui nous faisaient grandir, d'avoir entrevu des images interdites, d'avoir pleuré en cachette ou ri un peu trop fort dans l'atmosphère moite de ces salles obscures où vibrait à l'unisson ce commun sentiment de bien-être, cette évasion collective vers une promesse de mieux, magiques sensations portées loin sur l'écran de nos intimités par le faisceau bleu du projecteur où tournoyaient de minuscules étoiles filantes vers LE BONHEUR !

 

Si, depuis bien longtemps, le "cesser le feu" des batailles de cow-boys à été prononcé, et les chevaux reconduits aux écuries du passé, les discussions passionnées, enflammées, acharnées se sont également éteintes. Eteint aussi cet inexplicable sentiment d'avoir connu "autre chose", expérimenté d'autres idées, découvert d'autres façons d'être, possibles ou impossibles, mais d'avoir eu accès à un monde différent et pourtant si proche. Avoir ri ! Avoir rêvé !

 

Comprenons-nous bien, il ne s'agit pas de déplorer un passé, un paradis perdu, une jeunesse, un "c'était mieux avant", du temps des lampes à huile et de la marine à voile, non pas, mais bien d'observer que la plupart de nos cinéastes ne nous servent plus désormais qu'une froide image de nous-mêmes, le film documentaire de nos propres vies, allongé à l'infini dans la grisaille de nos "psychoses", ne nous tendent plus que le miroir inquiet de notre époque dans lequel s'agitent nos soucis, évoquant involontairement les silhouettes dérisoires et sautillantes d'antiques films muets.

CE PEUT-ÊTRE UN CINÉMA. CE NE PEUT-ÊTRE TOUT LE CINÉMA.

Rendez-nous la vie, la joie, la vitesse, l'émerveillement, la musique, les couleurs, rendez-nous des histoires, belles, tristes, drôles, inquiétantes, mais des histoires qui racontent des choses étonnantes, des choses surprenantes, ahurissantes, des histoires avec des paysages de soleil, de mer, de vent, de forêts, de planètes, de vie..Rendez nous le cinéma, le vrai ! Faites bouger des images afin que bougent nos idées.

 

Rendez-nous LE BONHEUR de se retrouver ensemble et de partager des sentiments comme les parts d'un gâteau d'espoir à dévorer à pleines dents.

 

Et cessez d'impitoyablement nous ouvrir cette "fenêtre sur cour" grise et ennuyeuse, où se morfondent dans une pesante ronde nos inquiétudes et nos difficultés. Nous ne les connaissons que trop !

 

Alors, désembuez vos objectifs, faites un grand courant d'air d'images et de sons, affûtez vos crayons, mélangez le tout et servez très vite.

REDONNEZ-NOUS L'ENVIE DE DIRE, ENTHOUSIASTES :

Ce soir, on va au cinoche !

Pour voir quoi ?

UN FILM BONHEUR !

 

Jean-Claude Rocle

jcrocle@filmsbonheur.com

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